Nunc est bibendum (maintenant, il faut boire)
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La vie, c'est de l'eau. Si vous mollissez le creux de la main, vous la gardez. Si vous serrez les poings, vous la perdez. (Jean Giono)
Dans le règne animal, il n'y a pas trente-six façons de boire (un liquide, pas des paroles), il y en a quatre :
Téter : qui est commun dès le plus jeune âge à tous les mammifères ;
Laper ;
Aspirer ;
Verser (dans la bouche).
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Le tétage n'est pratiqué qu'en bas âge par tous les mammifères à l'exception d'un primate freudo-polymorphe-pervers (homo sapiens sapionce) qui le pratique à tous les stades de son développement (ou de sa régression) même s'il n'y a rien à boire.
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Le lapement qui consiste à envoyer le liquide dans la bouche à l'aide de la langue est pratiqué par bon nombre d'animaux, dont les plus proches de nous : le chat et le chien.
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Beaucoup d'autres boivent en aspirant la flotte. C'est d'ailleurs le cas du loup qui contrairement à son cousin le chien, ne lape pas, mais ce n'est pas la moindre différence entre nos deux canidés préférés (ou pas). C'est d'ailleurs une chose utile à savoir si jamais vous recueillez ce qui vous semble être un chien assoiffé : s'il se met à aspirer le liquide, c'est un vrai loup et donc, évitez surtout de le caresser pendant qu'il boit (et même après), sachant que la pression des mâchoires d'un loup peut être dix à quinze fois plus forte que celle du plus mordant des clebs. Je vous aurai prévenus hein !
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Enfin, le versement dans la bouche est réservé à l'Homme (le singe lape, je crois) qui à cet effet fait preuve de la plus grande imagination en inventant toutes sortes d'outils plus ou moins élaborés, précieux ou beaux.
Le plus rudimentaire et le plus ancien est le creux des mains qui lui épargne le ridicule de se mettre à quatre pattes pour sacrifier à un besoin de survie et lui permet de conserver à tout moment la fierté de sa hauteur d'esprit (ou simplement de crâne pour la plupart) en superprédateur planétaire qu'il est, après la bactérie ou les virus, du moins.
Bon d'accord, certains boivent couchés sous le robinet d'un tonneau — qui est invention gauloise, comme je l’ai déjà signalé, lien ici —, mais comme disait un soir un des mes amis avec qui je remontais péniblement de la cave : il faut de tout pour faire un homme d’expérience et in fine, un monde, civilisé ou pas.
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On pourrait affirmer en guise de conclusion que si l'homo sapiens sapionce a si bien réussi dans la vie, c'est qu'il a eu du bol — dans la main, avec un poil ou pas.
Illustration : Guido Reni (1575-1642) Bacchus buvant (1623) Huile sur toile (72 x 56 cm) Gemäldegalerie, Dresde, Europe.
Fin de loup