Les runes du loup-garou – Fragment n° 89
J’ai trouvé ça au fond de ma tanière parmi les feuilles et les ossements :
« Partout, les restes délabrés de notre sacro-sainte civilisation se dressent dans le ciel noirci, étendards déchirés d'un empire de métal et d'orgueil, temples en ruine d'un culte impie à la modernité…
Nous grouillions sur la Terre, comme des sangsues. La nature se flétrissait au contact de nos villes. Nos usines charriaient la pollution vers les eaux souterraines, et nous détruisions tout. L'homme ne se reproduisait plus, il pullulait. Nous ne survivions plus, nous dominions, souverains de ces terres qui nous ont élevés, bercés, nourris… Qu'étions-nous devenus sinon des parasites ?
Je fermais lentement le vieux carnet craquelé et frottais d'un geste machinal mes yeux fatigués… »
(Sven Thomasson Vërgson (STV), Homéostasie, 5 octobre 2067, Blogue « Blanc comme neige »
Note du loup : Bien que je me dise « loup-garou » ; bien que je me vante d’être le précurseur de la « philosophie quantique », j’ai toujours du mal à jongler avec le temps, l’espace, l’être et l’Autre.
Ça viendra peut-être, ou pas…
Chaque matin, au réveil, on se dit que la vie vaut mieux que la mort – de toute façon, avons-nous le choix ?
On se dit que le présent vaut mieux que le passé et que l’avenir sera paradisiaque sans aucun doute.
On se dit aussi que dans ce paradis terrestre avec des heures sup ou pas, on pourrait se faire chier à regretter l’enfer – prémédité - 35 heures sur 24, voire plus.
Tout le monde il est beau et il sera joli ; c’est sûr Arthur !
Chaque matin, au réveil, on se dit que nous sommes le fruit de la meilleure des races et du meilleur des mondes.
Chaque matin, au réveil, on se dit que nos gènes sont trop méga graves géniaux et je te nique toi, le singe à poil comme ta mère devant le monoprix en ruine.
Chaque matin, au réveil, on se dit que nos géniteurs grands ou pas, pères, mères, oncle, tante ou autre n’auront vécu que pour notre bien, notre salut et pour nous gagner enfin une place gratuite en or à Eden Park.
Eden Park de chez Disney, Mac Do, Paris-Match ou Libé – vu à la télé au journal de vingt heures !
Chaque matin, au réveil, on se dit que le soir même on aura des couilles en or massif grave et que tous les cons de la terre – Esus sait combien ils sont nombreux - n’y pourront jamais rien.
Chaque matin, au réveil, on se répète ce que l’on affirmera de définitif peut-être à notre connard de collègue qui, chaque matin, au réveil, fait exactement la même chose que nous.
Chaque matin, au réveil, on se demande s’il y aura de l’eau chaude pour la douche et des olives sur la pizza « di caprio regina royale » commandée à la hâte entre deux parties de tennis perdues, évidemment…
Chaque matin, on se dit que la vie, c’est pas de la balle in fine…
Chaque matin, au réveil, on se demande si on rencontrera enfin la meuf super chouette qui nous fera bander comme il faut, entre deux pastis et qui accessoirement nous fera bon gré, mal gré, des gosses de tout sexe âge, poil et sexe – beaux comme des dieux et que l’on se forcera à aimer ou à châtier ou pas.
Chaque matin, au réveil, on refait le monde sur le comptoir de notre oreiller en plume d’oie synthétique ou pas…
Et mon cul, c’est du poulet aux morilles ?
Telles sont les questions que Sven Vergson nous pose (presque) chaque jour que le Grand Pan ou un autre enfoiré de sa race fasse ou pas.
Moi, j’aime bien le concept du blogue de STV : C’est le journal internaute d’un mec même pas encore né qui passe sa vie future à glander comme tout à chacun dans des galeries sous un tas de neiges et de glaces en se rappelant de temps en temps – pas tout le temps hein – notre chienne d’existence d’avant la fin du monde, d’avant l’apocalypse de dans pas longtemps.
Le STV, dans son igloo de science-fiction, voire de science friction, il a même conservé les runes de son oncle du siècle n° 20 et parfois il se masturbe dessus grave comme un chien de traîneau sur une peau de phoque en poil de RTT de chez Ikea.
Gamin va !
Mais c’est du bon à chaque fois et ça fait du bien par où que ça passe en ADSL ou sous les aisselles et le mot « apocalypse » ne signifie que « révélation » pas plus, pas moins.
Tout son blogue est aussi mystérieux et clair que le tableau de Friedrich en illustration : C’est du quotidien de banquise de banlieue niçoise : Calme, précis trivial sans doute, luxueux parfois, vulgaire un peu, rare, froid, cordial surtout et in fine, universel et humain.
Le STV tiens, c’est un blogueur plus que virtuel.
Et plus que virtuel t’es pas mort parce que t’es même pas né, hé connard ! Et si tu comprends pas ça, nique ta mère sur la banquise, tête de mort !
Trop fort le STV.
Bon sinon, je le connais le Sven et pas en virtuel, ni en plus ou en moins, je le connais grave pour lui avoir serré la pince en réel de chez Directlive.
Et je peux vous dire messieurs dames que le STV est - en plus - un très chic type et même un garçon mieux qu’imparfait.
Il sait comme moi que nul être sur cette planète est blanc comme neige : C’est là notre malheur comme c’est aussi notre défi et finalement notre seule chance.
La neige est-elle vraiment blanche en fait ?
La neige est quantique comme nous tous et nous ne sommes pas des dieux.
On t’aime STV ; Il fait glacial aujourd’hui ; il fait peur désormais; il y a un sale temps dégueulasse à vomir tous les cons de la terre, mais reste avec nous quand même hein, ne nous laisse pas tomber de froid.
Illustration : Caspar David FRIEDRICH (1774-1840) paysage d’hiver (1811) National Gallery, Londres.
Fin de loup