Pas l’ombre d’un clone
19 Décembre 2006 Publié dans #Quantiques du loup
Ce matin, comme d’habitude, je me suis réveillé bien avant que mon réveil ne me réveille pas.
J’ai allumé.
J’ai alors jeté un regard sans espoir sur le thermomètre sonde qui n’osait pas afficher le zéro vengeur des Hivers opprimés.
Je connais trop cet animal électronique d’un optimiste béat et servile pour me douter qu’il mentait comme un arracheur de dent.
Plus tard, mes premiers pas dans la nuit aurorale me confirmèrent qu’il gelait bel et bien.
Poussant incontinent un de ces soupirs résignés et hivernaux, je me renfrognai aussitôt en un gracieux lobe fœtal dans le ventre douillet de mon lit chaud et protecteur.
J’aperçus alors mon ombre projetée sur le mur par la lumière de la lampe de chevet.
L’envie me prit alors de taquiner grave cette fidèle et muette compagne de toujours en lui demandant si, pour une fois, une seule petite fois, elle ne voulait pas se lever seule pour aller faire le clown dans le grand cirque du dehors où il fait froid et bruit puant.
Comme d’habitude, elle ne répondit pas et cette rosse ne bougea pas l’ombre d’un pouce du moindre quart de millimètre.
Une fois de plus, le clown était seul face à sa destinée et se devait de tout faire d’utile et de laborieux pour engraisser sa feignasse d’ombre.
Mon ombre est vraiment une garce : Non seulement, elle est servile, frigide, puérile, stérile et futile, mais en plus je suis convaincu qu’à chaque sombre occasion, elle en profite pour me tromper avec quelqu’un de certainement plus brillant que moi.
Mais elle si attachante en fin de compte, c’est clair…
Quand mon réveille-matin eut enfin sa grande claque quotidienne, j’étais en train de me demander si le grand pied paradisiaque ne serait pas d’avoir un clone de chez soi-même qui serait quotidiennement chargé sans mot dire de faire tout les sales boulots.
Un bon vieux clone bien jumeau pour subir toutes les injustices, les privations, les ennuis et les engueulades à sa place pendant qu’on serait douillets grave dans notre lit à se demander combien de croissants (qu’il serait allé chercher en courant) on allait engloutir au petit-déjeuner.
Mais bon, pour être un clown ou son clone, on n’en est pas moins homme et des siècles des lumières nous ont appris qu’on avait toujours un reliquat d’amour-propre ou de fraternité au fond de soi-même pour comprendre qu’il puisse se révolter un jour et vous jeter à son tour dans l’ombre de l’esclavage qu’on lui fit subir.
Nous ne sommes pas impunément les maîtres ou les ennemis de notre ombre, aussi clairs ou brillants soyons nous.
Pour faire marcher mon ombre, il me faudra toujours me bouger et me convaincre qu’il ne faut plus espérer apercevoir l’ombre du moindre clone de moi.
Il faudrait se dire ça aussi en regardant ses enfants, si on en a.
Finalement, c’est vrai que ce désir de faire effectuer les basses oeuvres par les autres est aussi ancien que l’ombre froide et silencieuse de l’humanité.
Ceci étant, je suis allé bosser aujourd’hui et la mienne d’ombre, je ne lui causerai plus jamais, na !
Fin de loup
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