« Il entendait au fond de sa peau la France se déchirer tout du long, tout du long avec un bruit d’étoffe qui craque » (Alexandre Vialatte, Le Fidèle Berger)
« S’il est une chose insupportable au démocrate, c’est le plaisir de l’égalité. Il veut des records, des stars, des personnages mythiques. » (Alexandre Vialatte, Dernières Nouvelles de l'Homme, les Chroniques de la Montagne)
Note : et puis à ce « démocrate », il lui faut aussi des drapeaux exotiques, des hymnes rageurs, des devises bétonnées, des slogans rigolos, des hommes providentiels et sportifs gagnants, de préférence, mais avant tout, des diables, des boucs émissaires, des tabous et des martyrs, tout plein de martyrs à lustrer, à schadenfreuder et à oublier aussi sec et sots, entre la poire hongroise et le fromage de Hollande.
Il lui faut encore des leçons d’amours sales, du linge propre sans famille et des devoirs de mémoire pour poisson rouge, noir, blanc, beur, gris, jaune ou vert martien.
Aujourd’hui, on s’arrache à prix d’or la vulgarité encrée d’un dernier cri chic, tandis que par précaution, par principe, par couardise, par soumission et surtout par hypocrisie, on retire des étalages les livres houleux, rebelles ou puants du bec et on emprisonne des sombres clowns imbéciles et — on ne sait donnés à quel dieu — pour leurs minables calembours.
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Nos paumés politi-chiens sans collier ne sont démocrates que certains jours, le dimanche par exemple, comme certains peintres amateurs, et mercredi (par exemple) ils deviennent fous et démagogues.
Le dimanche, ils cirent les pompes (funèbres ou pas) d'Ahmed, de Pierre ou de Jacob, et le mercredi ils étrillent Paul, Léonarda, Karl ou Michel.
Le dimanche démocrate et le mercredi démagogue.
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Du reste, la démagogie est à la démocratie ce que la tétine synthétique, amorphe est au téton bien vivant des seins de la liberté mère : un leurre. Quand bébé Peuple pleure, on lui fout le nichon dans la bouche pour le nourrir et une fois qu'il a roté, on le lui retire illico pour le remplacer par ce truc ignoble à mâchouiller comme un veau qu'il est (comme disait Charles — de Gaulle, pas Martel)
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La démocratie, cette fille de rien et des rues qui se perd sans cesse entre l’arsenal et l’entrepôt ; cette vieille utopie, cette idée antique introduite désormais de force dans le fondement des peuples modernes, béats, obèses, festifs et panurgiens, sous forme de suppositoires génériques de moins en moins vaselinés, avec colorants républicains, additifs médiatiques, moraline 89, 93 ou 68 g sans peser l’opium, le plomb, le sucre candie, l'amiante parfumé au diesel tagada, le tout taxé à 500 %, remboursé des nèfles et non déductible des impôts.
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La démocratie est devenue une sorte d’euphorisant à effet placebo, voire nocebo, délivré uniquement sous ordonnance par de maffieux et puissants charlatans sélectionnés, nommés et diplômés par eux-mêmes, qui, à l’instar de la médecine, ont rendu illégal son exercice par tout autre péquin non encarté ou ne pensant pas comme il faut de chez Correct & cie ltd.
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Le première citation de Vialatte est tiré de son roman autobiographique Le Fidèle Berger, un texte superbe, honnête, humble, humain et déchirant, qui mériterait entre autres d'être étudié dans les lycées français ou européens, au lieu d'on ne sait plus trop quels bourrages de crâne farcis de faux-vrais morceaux de vérités officiellement historiques, partisanes, communautaires, syndicales ou étatiques.
Ce récit — dont je reparlerai — se situe en 1939 pendant la débâcle française que vous savez.
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À propos de débâcle d'autres printemps de mes deux, à propos de déchirement ou d'effondrement, cette république recommence vraiment à sentir la merde, sinon la pourriture et dans cette puanteur et tout ce bordel sans nom et prénom, moi, JE NE SAIS PLUS QUI JE SUIS.
Illustration : Eugène DELACROIX (1798-1863) La liberté guidant le Peuple (1830) Huile sur toile (260 x 325 cm) Musée du Louvre, Paris, Europe.
Fin de loup