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Martin-Lothar

Les trois foies de l'oie

30 Novembre 2014 , Rédigé par Martin-Lothar Publié dans #Boire & manger, #Bestiaire, #Le Dico

Les trois foies de l'oie
« What I tell you three times is true. »
Ce que je vous dis trois fois est la vérité.
(Charles Lutwidge Dodgson alias Lewis Carroll,1832-1898, La Chasse aux Snarks)
 
C'est bientôt Noël et déjà les vitrines de partout vrombissent de crèches robotiques, électroniques, de sapins plugués défiacqués mous et de festives guirlandes plus fluo tumeur devant ta mère niquée grave devant le Prisunic AOC-bio, pas cher, casher, voire halals de ta race en solde, démarquée et moribonde à moins de zéro quatre-vingt-dix-neuf eurosflouzes sans taxe, ni CSG.
C'est bientôt le jour de l'An aussi, parce que galettes des rois en novembre, noël en décembre et que voilà, mes frères un somptueux nouveau proverbe à ravir les starlettes de télé idiotes et les ministres en prison trois étoiles pas tristes itou.
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C'est donc le moment de tuer l'oie de votre haute ou basse cour, ou tout court de votre baignoire d'élevage, d'aquarium, que vous aurez évidemment savamment, tendrement et amicalement gavée pendant douze jours de substances substantielles sans sel ajouté, colorant, ogéhemen satanique ni préservatif goûteux chimique, en lui racontant des histoires à dormir debout et couché-panier, ta gueule, c'est moi qui paye ; en lui récitant les alexandrins des derniers deux mille articles tous frais du code fiscal ou du boulot ; en lui narrant les exploits ultimes et à jamais ordinaires de Franck, de Manuel, de Nicolas, de Marine, de Ségolène et d'autres joyeux, insipides, inutiles et superfétatoires pieds nickelés de nos deux ; bref, en lui faisant penser à autre chose que sa vie, sa mort, sa destinée d'étagères, de courges ou d'aqua-serges gainsbourgeois de toussa et d'alors, puis de rien, merci.
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C'est le moment de dépecer l'oie Ansa, c'est son prénom de toujours comme Jean-Michel est celui de tous les jars qui la jargaude (qui la couvre, qui la nique, qui la tringle) en requiem in-pascsé ou en mariage pour tousser.
Qu'importe, il faut toutefois, avec foi, appliquer la loi de l'oie et de son foie.
C'est le moment de faire sa fête à l'oie, de séparer le cou des plumes, les pattes des entrailles, et surtout, son gras foie sans foi ni loi de tout le reste, pour le plus grand bonheur des voyageurs, des gourmets, des écrits vains et d'autres êtres de goût, mais point d'égout, amateurs éclairés d'oreillers dodus et moelleux à la fois.
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Mais avant de la tuer, il faudra dire une bonne fois pour toutes à notre oie Ansa (ou Hamsa ou encore Akka pour les Nils Holgersson) que le mot français « foi » est un descendant miteux et déshérité du mot latin « fides » qui signifiait « fidélité ».
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Il conviendrait aussi de lui avouer que l'homonyme « fois » est en fait un horrible bâtard du vieux substantif franchouillard « fez », dérive de « fait », de « faire » et d'autres gestes ou événements plus ou moins espérés et organisés.
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Et avant le coup de grâce, et dans la foulée du cou de graisse, il serait loyal de révéler à notre petite mère l'oie que l'organe majeur et le savoureux abat gras peu ou prou, qui nous intéresse avant tout et nommé « foie » n'a rien à foutre ni du « f » ni de l'« oie », mais, comme l'homme et le singe, ce machin vocal et scriptural descend tout droit d'un arbre nommé « ficus » ou figuier.
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Et notre volaille palmipède de mourir de fierté en apprenant que son « foie » est le noble rejeton d'une tradition multimillénaire voulant que l'on engraisse les oies et autres canards avec une purée de figues que d'aucuns grands top chefs cuisiniers & maîtres queues ont du reste (orant) toujours servie avec le « foie gras », et ce, depuis la plus haute antiquité persane, grecque, égyptienne, romaine, gauloise, française et d'autres temps et lieux enfin.
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Voilà ce qui serait sympa de dire aux oies avant de les massacrer sans foi pour le leur, même si elles s'en foutent comme de leur premier duvet et même si elles ne comprennent pas un traître mot du langage de votre coin (coin !)
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Tout ça pour vous signifier qu'il n'y aura jamais meilleur foie gras que d'oie, à manger arrosé d'un vin de figue ou d'autres liqueurs liquides, sachant que de plus en plus d'académies de médecine y retrouvent enfin de multiples vertus vitaminiques et anti colère de chez Stérol.
Mais bon, beaucoup d'entre nous savent maintenant que le meilleur des experts est avant tout un humain et un contribuable, et souvent une trop, jeune oie, comme tout le monde quoi.
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Va falloir un jour que je me fende d'un billet long et chiant sur cette sacrée oie sacrée.
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On t'aime l'oie, et ton foie, ma foi et des fois ; reste avec nous.
 
Illustration : une chic oie de l’Aveyron. Photo ML, Juillet 2011.
 
Fin de loup
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