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Martin-Lothar

Marche dans les champs nus sous la pluie

28 Mars 2009 , Rédigé par Martin-Lothar Publié dans #Le manuel de survie

Encore un de mes poèmes de jeunesse que j'intègre au Manuel de survie.
Merci pour votre indulgence : J'étais déjà jeune à l'époque !
Bonne lecture.



Hier le sacre des haches dans les latrines
Et les trafics d'horloge aux heures de foison.
Demain les faux airs des musiques marines
Et les siestes sous le pagne des moissons.

Demain pour toujours, les ombres de nos pénombres,
Les tables polaires et les miracles sûrs.
Hier les ordres et la théorie du nombre,
Demain la loi du plus grand signe sur les murs.

Hier aussi les vieux saules fébrifuges
Et les généreux fondateurs de capitale.
Demain la géographie de nos refuges
Loin des hommes de Babil et de leurs scandales.

Demain les sages naufrages de la jeunesse
Et les bons vœux d'Arthur à sa verge éblouie.
Hier tous les apôtres de sang et de graisse
Et les marches dans les champs nus sous la pluie.

Hier les reptiles superbes et malins
Et le cigare chauve des jours en déroute,
Demain le gentil carnage des orphelins
Et la fourbe saveur des liqueurs de vrai foutre.

Hier, temples, pyramides, basse-cour,
Le rudiment des rois et l'antre de leur reine,
Hier les massacres, demain les secours
Et le malheureux viol des veuves sereines.

Hier toutes les prouesses des alchimistes,
Leurs œufs d'or, leurs cathédrales et leurs palais.
Demain la piété molle des optimistes
Et les scouts en transe sur nos corps étalés.

Hier la caravane appelant sous le vent
Ses chiens perdus sous des siècles de suie.
Demain la fébrile vendange des savants
Et les marches dans les champs nus sous la pluie.

Hier le commerce de nos cœurs en sorbets
Et la sempiternelle tristesse des ports.
Demain les forteresses aux sombres gibets
Où livides s'agiteront nos jeunes corps.

Hier la mort douce des singes indigènes
Vendeurs de terres d'angle et de fruits en tige.
Demain la terrible logique de nos gènes
Sous le voile noir des nuées sans vertige.

Hier l'abrutissant flot des boissons affreuses
Et les mousses saignant sur de sombres radeaux.
Demain les réveils laiteux des aubes herbeuses
Et la vaine panique des plaines sous l'eau.

Hier encore, la religion des orages
Et le geste doux des dieux qui s'ennuient.
Demain la violence des noyaux en rage
Et les marches dans les champs nus sous la pluie.

Hier les amitiés mouillées des chauffeurs
Et la fuite des lunes sur la passerelle.
Demain la fièvre sourde des assoiffeurs
Et le bruit singulier des crabes sous la grêle.

Hier l'orgasme de tous les orgues vivant,
Avec l'ivresse des chœurs sur nos âmes saoules.
Demain la fausse mémoire des survivants,
Les faits sans histoires et l'hystérie des foules.

Hier la chasse pitoyable des faisans lions
Et les culottes des anges saignés en fraude.
Demain l'assurance de toutes les unions
Et la clarté lascive des agates chaudes.

Hier l'enfance cachée sous les rhubarbes
Non loin des talus et des fouilles inouïes.
Demain nos rêves blanchissant sous nos barbes
Et les marches dans les champs nus sous la pluie.

Illustration : Jean-François Millet (1814-1875) Le printemps. Musée d’Orsay, Paris, Europe.

Fin de loup
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M
bin moi je dis <br /> c'est du grand Lothar !!!!<br /> j'adore<br /> vraiment !!!
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M
<br /> Mélusine : Merci. Quand j'étais petit, j'étais déjà grand.<br /> <br /> <br />
I
Oui c'est pédestre !
Répondre
M
<br /> Ipidiblue : Tu aurais pu dire : "Quel pied !" Pff !<br /> <br /> <br />
M
Les années 60-68, un pied encore ancré dans le convenable, littéraire sans alexandrin pur mais avec la musicalité, et l'envie, l'approche, le juste "osé"... avoue, quel âge avais-tu et c'était quelle année?
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M
<br /> Mlle Beulemans : Quelques années plus tard quand même pour la trame (1970-1972) . Ces poèmes ont été remaniés plus tard, c'est vrai (1983) dans la vile même où je les publie aujourd'hui !<br /> Je n'ai peur ni honte des alexandrins car la poèsie de nos jours doit être soeur de liberté, de charité et de foi. Na !<br /> <br /> <br />
S
Ma barbe commence à blanchir, mes cheuveux aussi et mes rêves ?
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M
<br /> Saturnin : Nous avons le temps, rien que le temps, mais ce n'est pas si mal en fait !<br /> <br /> <br />
G
je ne sais où te mettre ça (le comm je veux dire) mais j'ai entendu que les requins en avaient deux, de pénis... Tu as mal choisi ton totem !
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M
<br /> Giov : Qu'importe le nombre de pénis, pourvu que nous ayons des courses à faire.<br /> <br /> <br />
G
un climat à la Iictor Hugo et le vocabulaire débridé mais cela me plait bien...Evidemment ce tableau de printemps me fait penser à une scène de Lady Chaterley -roman- dont j'ai beau feuilleter les deux versions, je ne retrouve pas trace. Fantasme de cette course, nue -elle- sous la pluie et les yeux de lui ?
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M
<br /> Giov : Quand l'ai composé ces poèmes, j'étais bien loin de tout (et des ladies aussi)<br /> <br /> <br />